Entretien Jean-Claude Benazet – 25 avril 2023
Bien sûr, je connaissais, comme beaucoup, ce chant des pèlerins, je l’avais chanté lors de repas pèlerins, en marchant sur le chemin en compagnie d’autres pèlerins. Mais d’où il venait, qui l’avait écrit et composé, de quand il datait, je n’en avais pas la moindre idée.
Pour l’écouter en version originale et complète
Tous les matins …. Ultreïa
Tous les matins nous prenons le chemin,
Tous les matins nous allons plus loin.
Jour après jour, la route nous appelle,
C’est la voix de Compostelle.
Refrain: Ultreïa ! Ultreïa ! Et sus eïa Deus adjuva nos !
Chemin de terre et chemin de Foi,
Voie millénaire de l’Europe,
La voie lactée de Charlemagne,
C’est le chemin de tous les jacquets.
Et tout là-bas au bout du continent,
Messire Jacques nous attend,
Depuis toujours son sourire fixe,
Le soleil qui meurt au Finisterre.
Quand j’ai su que Jean-Claude Benazet qui était à l’origine de ce chant pèlerin avait pris sa première adhésion à la société française dans les années 1980 et qu’il habitait à Lavaur dans le Tarn, j’ai eu envie de le rencontrer pour qu’il me raconte l’histoire de ce chant.
Nous nous sommes retrouvés chez moi ce mardi de fin avril pluvieux, à Lautrec, un peu avant 10 H. Et en buvant notre thé, Jean-Claude m’a raconté.
Ce chant est né sur le chemin, en juillet 1989, en marchant, entre Cajarc et Cahors, il y a 34 ans. Il a été créé en 4 jours, par moi, un pèlerin non musicien, pour meubler les heures de chemin. Il a été créé sans objectif musical et sans objectif poétique.
Quand il écrit ce chant, Jean Claude n’en est pas à son 1er chemin. «Mon 1er chemin, je l’ai effectué en 1981, avant les flèches jaunes», me dit-il. Avant de partir, il contacte Jeanine Warcollier, la secrétaire générale de la SFASJC et devient adhérent de la SFASJC. Il part avec le.seul guide en français qui existe « Le Chemin de Saint-Jacques en Espagne » écrit par l’abbé Georges Bernès dans les années 1970, et qui restera longtemps l’unique guide en langue française.
Jean-Claude reprend son histoire.
C’est un chant court, facile à retenir. Dans la première strophe, j’ai voulu évoquer le quotidien du pèlerin.
Dans la 2ème strophe, j’ai voulu parler de l’histoire du pèlerinage de St Jacques et du songe de Charlemagne.
Dans la 3ème strophe, j’aborde ce qui attend le pèlerin à l’arrivée à St Jacques de Compostelle. Sur «EL PORTICO DE LA GLORIA» (le portail de la gloire), St Jacques fixe avec un léger sourire le soleil qui meurt au Cap Finisterre, comme pour inciter le pèlerin à s’y rendre.
En ce qui concerne le refrain, je ne pouvais qu’emprunter les paroles du Dum Pater familias , ce beau chant médiéval. Il est bon de les rappeler : Ultreïa et sus eïa, Deus adjuva nos. Ce qui signifie : « Aide-nous, Dieu, à aller toujours plus loin et toujours plus haut. »….
Le 1er divulgateur de ce chant est José Ignacio Díaz, actuellement curé de la paroisse de Santiago el Real à Logroño. « Début août 1989, j’ai partagé ce chant avec lui. Depuis il le chante à toutes les bénédictions de pèlerins. »
Pendant 30 ans, le chant s’est diffusé de bouche à oreille. Certains ont supprimé la dernière strophe, la traitant d’hérétique. D’autres ont modifié des paroles, rajouté des strophes, accusé Jean-Claude de plagiat pour la musique…Mais le chant du pèlerin a suivi son chemin. A Jean-Claude, cela ne lui plaît guère que son chant soit déformé, tronqué, rallongé, dénigré.
En 2012, il décide de reprendre les choses en main. Aidé par son fils, il poste la chanson sur youtube.
En 2015, Jean-Claude rencontre un guitariste espagnol: José Ignacio H. Toquero qui va l’aider à enregistrer son premier disque.
En 2019, le CD est commercialisé. 1300 exemplaires circulent. Sur le disque, intitulé « Chants pour pèlerins », on trouve d’autres chants dont musiques et paroles sont également écrits par Jean-Claude «A Fisterra llegaré» et « Porqué tan lejos » et d’autres morceaux choisis.
Et, si vous souhaitez avoir la partition musicale, il faudra vous adresser directement à Jean-Claude qui en est le seul propriétaire et détenteur.
Jean-Claude a d’autres cordes à son arc. Actuellement il produit une conférence sur la légende du « Pendu/dépendu ». Vous vous souvenez du coq et de la poule dans le beau poulailler gothique de la cathédrale de Santo Domingo de la Calzada ?
Mais de cette histoire, nous en parlerons une autre fois.